L’arrestation de Victoire Ingabire après son retour au Rwanda en 2010, pour se présenter comme candidate aux élections présidentielles, a attiré beaucoup d’attention au niveau international. Son procès au criminel, l’un des plus long dans toute l’historie du Rwanda est d’une très grande importance au niveau juridique et politique, car il est en soit un test pour le système judiciaire Rwandais en sa capacité de pouvoir traiter et juger de façon impartial et indépendante, des politiciens de haut niveau.
A son arrivé au Rwanda le 16 Janvier 2010, Le premier jour de son retour après 16 ans d’absence, elle s’est rendue au mémorial du génocide de Gisozi où est enterrés des milliers de victimes tutsies du génocide pour y déposer une gerbe. Elle y a prononcé un discours dans lequel, faisant référence aux problèmes de réconciliation et de violence ethnique, elle aborda des problèmes auxquels on ne fait jamais référence au Rwanda.
Elle sera arrêtée en Avril 2010. Elle fut libérée sous caution, mais s’est vu refusé le droit que quitter sa maison et de quitter la capitale Kigali. Elle sera encore une fois arrêtée le 14 Octobre de la même année et gardée en détention préventive. 4 hommes indiqués être d’anciens membres de la force démocratique de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé basé a l’est du Congo ont été jugé avec elle comme co-accusés.
Le Rapport d’Amnesty international sur le procès De Victoire Ingabire.
Amnesty international a produit un rapport détaillé sur ce procès de Victoire Ingabire, dans lequel Sarah Jackson, directrice adjointe par intérim du programme Afrique d’Amnesty International a résumé dans ces mots :
« Le procès en première instance de Victoire Ingabire a été entaché d’irrégularités, et les normes internationales ont été bafouées »
Amnesty International a observé le procès dans sa quasi-totalité, de septembre 2011 à avril 2012, et a constaté que Victoire Ingabire a été traitée de manière injuste à de nombreuses reprises. Les juges paraissaient chercher la confrontation avec la défense, et l’accusée était régulièrement interrompue ou réprimandée par les magistrats. Les éléments de preuve étaient traités différemment selon qu’ils étaient produits par la défense ou le parquet : ceux qui étaient présentés par la défense étaient remis en cause de façon répétée, tandis que des questions fondamentales en rapport avec les informations fournies par le parquet n’étaient pas posées. D’autres faits reprochés à Victoire Ingabire au début du procès, ceux concernant ses propos, se fondaient sur des lois vagues et imprécises sanctionnant l’« idéologie du génocide » et la « discrimination et le sectarisme», et la défense aurait eu des difficultés à déterminer en quoi son comportement constituait une infraction. Ces lois ont été adoptées afin de faire barrage aux discours incitant à la haine au cours des années qui ont suivi le génocide de 1994. La formulation vague de ces textes a cependant été utilisée à mauvais escient afin d’ériger en infraction la liberté d’opinion et l’opposition.
« Après avoir examiné les éléments de preuve produits lors du procès, Amnesty International ne voit pas ce qui prête à penser que Victoire Ingabire avait l’intention d’inciter à la violence ou à la haine à l’égard d’une ethnie, a ajouté Sarah Jackson.
Les accusations de terrorisme s’appuyaient en grande partie sur des aveux obtenus à la suite d’une période de détention sous la responsabilité de l’armée, au camp Kami, où la torture serait employée. Le tribunal n’a pas suffisamment enquêté cet aspect du procès. « Amnesty International a recueilli des informations selon lesquelles des détenus ont été soumis à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements au camp Kami. Le fait qu’au moins deux hommes jugés en même temps que Victoire Ingabire y aient été incarcérés pendant des mois avant de l’incriminer nous inspire de graves inquiétudes et doit donner lieu à une enquête.»